Semble-t-il l’homme moderne existe 8000 générations. Autrement dit, nous ressemblons de très prêt à tous ces humains disparus avant nous. En revanche, les conditions de vie n’étaient pas les mêmes, tellement plus hostiles. L’espérance de vie ne dépassait pas 35 ans. Nous étions parents à peine sortie de l’enfance et des vieillards à 30 ans. Lorsque l’on y regarde de plus prêt, nos cousins les grands singes qui partagent 98% de notre code génétique vivent 25 ans dans la nature et 35 dans nos zoos. Et puis, le monde scientifique nous dit, parfois très discrètement pour ne pas nous faire peur, que notre ADN se dégrade dès 40 ans : ne serait-ce pas tout simplement le signal de la nature de « laisser la place aux suivants » ?

Depuis 200 générations, nos conditions de vie s’améliorent de plus en plus, en tout cas dans le monde industrialisé et notre espérance de vie s’allonge, 80, 90 et 100 ans.

Nous vivons bien plus longtemps grâce à nos outils sophistiqués. Par contre, nous perdons le lien avec la nature. Comment le conserver lorsque nous sommes 70% de notre vie d’adultes dans des voitures, bureaux, avions et maisons ?…. et devant nos écrans ? Nous sommes si connectés aux informations qui circulent, de plus en plus et de plus en plus vite, que nos amis n’ont plus rien à nous dire et nos vies se vident de sens.

500 amis sur Facebook et personne pour m’aider à déménager.

Revenons sur notre ancêtre préhistorique avec son espérance de vie réduite. Lorsqu’il devait penser au passé ou à l’avenir il ne restait pas longtemps dans son mental. Comment son père chasse le mammouth ? Il y pense et ensuite efface cette vision. Il pense à la neige qui va tomber car il doit préparer la viande et la fumer. Il imagine le froid et vide sa tête de toute pensée inutile. Autrement dit, il ne s’identifie ni au passé ni au futur pour deux raisons pratiques : à quoi cela peut-il lui servir ? Il ne vit pas assez longtemps pour stocker des données du passé et les archiver coûte très chère en énergie dans un environnement où le moindre geste est de la survie ; et puis le futur est court. Pas besoin de projection. En bref, il vit dans le présent : chasser, manger, dormir, se reproduire et mourrir. Si on y regarde de plus prêt, nos enfants avant 6 ans ou les animaux fonctionnent de la même façon.

Le mental est l’extension de nos muscles et se muscle si nécessaire. C’est là que se logent les pensées dont la nature est d’être éphémère.

Aujourd’hui, nous vivons longtemps, bien plus longtemps que la nature nous a programmé. Ainsi, notre passé devient une base de données infinie et notre futur un immense potentiel de pensées à traiter. C’est la raison pour laquelle nous « vivons » bien souvent dans notre passé et dans notre futur. Lorsque nous sommes dans le passé, nous avons tendance à être triste : soit nous avons aimé et perdu ce que nous avons aimé, soit nous avons souffert. S’identifier au passé nous rend nostalgique. Lorsque nous sommes dans le futur, nous avons tendance à avoir peur : que va-t-il nous arriver ?

Nous savons qu’au bout du chemin, c’est la mort donc le changement ultime. Nous détestons le changement, l’inconnu, car cela nous fait peur.

Nous sommes donc figés par la peur de l’avenir, plombés par la résistance au changement. La conséquence est que nous vivons la plupart de notre vie dans le passé et le futur et peu dans le présent. C’est cette absence de présence qui nous rend triste, malade, vide. Notre embourgeoisement matériel nous a rendu passif, égoïstes et arrogants.

De nos jours, le volume d’informations est tel que nos pensées se bousculent en permanence dans notre mental : l’embouteillage est permanent, pas de répit.

Les conséquences de cet afflux de pensées sont terriblement destructrices. Physiquement, notre cerveau est l’organe qui consomme le plus de sucre. Comme il ne s’arrête jamais, il chauffe (qui ne se réveille jamais à 3 heures du matin ?) et il a besoin de sucre, trop de sucre. Ce sucre, omniprésent dans notre alimentation moderne crée des inflammations, nous rend malade, pollue nos organismes. Puis, lorsque nous avons trop de pensées dont la majorité est répétitive et négative (inconsciemment), le bavardage est si fort que nous ne pouvons nous défaire d’une forte identification aux pensées, que nous confondons à notre personnalité. Cette illusion est si puissante que nous sommes convaincus que tout ce qui se dit dans notre tête est LA réalité. Nous devons avoir raison. C’est ce que nous appelons l’EGO.

Nous ne vivons plus dans le présent, uniquement dans nos pensées passées et futures.

Personnellement, mon EGO naturellement sur dimensionné en a pris plein la tête et il n’a pas eu le choix de devenir plus cool. Abandonné à 7’000 mètres au Népal à la trentaine par mon guide et ruiné à 47 ans en 24 heures, ça calme :) J’ai vite compris que derrière cet EGO, il y a la conscience ou la confiance ou l’amour ou la présence, etc., qu’importe l’étiquette, « quelque chose » qui a la même nature que la lumière, le vent, la terre, l’eau, etc., « nous quoi », l’Humanité dont nous détenons tous une partie. A mes yeux, l’EGO est une lampe frontale qui nous rassure dans la nuit mais qui ne voit pas bien loin, et derrière ? et sur les côtés ? et en haut ? paranoïa égoïste. On s’accroche toute notre vie à une lampe frontale. Certains plus riches en ont même plusieurs, plus puissantes et des tonnes de piles. Ouf ! Alors que la conscience, calme et sereine, toujours présente est un simple interrupteur : mode ON et fini les peurs.

Il nous suffirait de se détoxer de nos égos pour laisser nos conscience s’exprimer !

Que se passerait-il si on fonctionnait différemment ? Plutôt de se dire des méchancetés, ne pourrions-nous pas nous parler avec bienveillance, même en désaccord ? A quoi sert-il d’avoir toujours raison ? J’ai une confidence à vous confier. Lorsque ma première femme, maman de mon fils, que j’aimais à en mourrir m’a quitté, je me suis senti perdu, effondré.

Bien heureusement ma conscience a pris le dessus et lui a parlé directement : « ce n’est pas parce que tu ne m’aimes plus que je vais cesser de t’aimer ».

Nous avons tous le choix d’aborder notre société, nos projets, nos ennuis et nos interactions avec nos semblables avec un autre point de vue : notre conscience ou autrement dit avec justice et objectivité.

Si nous abandonnons nos égos, nous changeons le Monde immédiatement.

Et si on essayait juste une fois pour voir ce que cela fait ? Tout simplement, si nous décidions de (re)venir Humain ? Qu’avons-nous à perdre en essayant ? C’est à notre portée.

Laurent Cordaillat