Suite à mon Game over, j’ai de suite pensé « jamais je ne repartirai là haut, je suis maintenant vieux, fatigué et j’ai grossi ». De toute façon, j’attrapais tous les virus et j’étais incapable de courir ! Les années ont passé, j’ai survécu et me suis reconstruit. 2019, je cours comme un lapin en montagne, 10 kilos en moins et quelques rides en plus.

Rien n’est jamais perdu dès que l’on accepte de perdre.

Me voilà maintenant organiser avec mon nouvel associé, Christian, lui-même chef d’expédition, un prochain voyage dans ces contrées. Ce qui est incroyable, ce sont les circonstances qui nous ont fait choisir cette destination, absolument pas en lien avec mon histoire personnelle. Je vais donc repartir, ici, fermer une boucle et en ouvrir une autre : n’est-ce pas le cycle de la vie ? Bien souvent on me dit « oui mais pour toi c’est facile ». Oui c’est vrai car je ne cesse de rêver et ce sont justement ces rêves une fois réalisés qui donnent un sens à ma vie, qui remplissent mon existence.

Je comprends que l’absence de rêve nous rend triste.

Dernièrement, j’ai fait une découverte, la plupart des gens n’a pas de rêves. J’ai plusieurs phrases fétiches : « c’est la faute de quoi et non pas de qui », « si nous partageons les mêmes valeurs, nos différences nous enrichissent », « quelle est ton histoire ? », etc., dont le but est de faire réagir mes clients et amis afin de lancer un débat. Depuis peu, j’ai rajouté celle qui est devenue ma préférée : « quel est ton rêve ? ». Question simple, si simple que personne ne la pose, ne se la pose. Les réponses sont incroyablement vides, comme si on n’osait plus rêver, plus croire en l’impossible à rendre possible. Et pourtant le rêve est propre à l’Homme. Une fois le rêve défini, il devient réalité en le transformant en projet, en objectif à réaliser avec des moyens à trouver, rien de bien sorcier en fin de compte. Visiblement, le plus difficile c’est d’avoir « son » rêve, son programme de vie.

Par manque de rêve, on consomme pour se remplir, on compense.

Nous vivons une époque extraordinaire où tout va très vite, très haut, plus fort mais dans cette accélération, on perd le rêve en route. Les aborigènes d’Australie nous l’expliquent depuis des millénaires, le rêve est notre univers mystique, notre espoir. Lorsque j’ai demandé à ma fille de 8 ans quel est son rêve, elle m’a répondu tout naturellement de vivre le moment présent. Il est vrai que je venais de lui expliquer la notion d’identification au passé, au futur et la difficulté à nos ancrer dans l’instant. Je ne sais pas comment et pourquoi mais elle a fait le lien tout naturellement entre la réalité du présent et le rêve. C’est là qu’elle m’a lancé la phrase la plus spirituelle que je n’ai jamais entendu. « Le » rêve lui a certainement soufflé :

J’ai hâte d’être maintenant !

Laurent Cordaillat