20 novembre 2024
Christian est venu à moi avec une demande claire : améliorer sa communication pour éviter les conflits dans l’entreprise familiale qu’il gère depuis la mort de son père. Il est conscient que sa négativité l’handicape dans ses relations humaines depuis des années, voire depuis l’enfance. Il a choisi de lui faire face plutôt que de l’alimenter.
De taille moyenne, trapu et visiblement sportif, il semble avoir peur de rien et de personne. Son fort caractère et sa position sociale de chef d’entreprise qui réussit ne laissent pas de place à l’introspection. Christian est cartésien et seul le résultat lui parle. Il n’a pas le temps de perdre du temps et attend de mon accompagnement un « truc et astuces » simple à appliquer, pour valoriser son patrimoine … humain.
Je comprends que de lui parler de l’Attitude Positive, de la gestion de l’égo ou encore de sortir de sa zone de confort est inutile car il n’écoute pas et affirme sans filtre qu’il « sait ».
Je décide alors de m’adresser à son corps qui me donnera l’information nécessaire pour l’aider à changer de prisme. De toute façon, il est hermétique à tout conseil. Je tente plusieurs sorties outdoor, avec un Guide de haute montagne, via ferrata, escalade : il reste imperturbable à l’effort, la beauté des paysages magnifiques que nous traversons et toute forme de gratitude. De plus, il a peur de rien, ni de l’inconnu, ni de la hauteur. Sa dureté apparente est déconcertante, mais que (se) cache-t-il ?
A force de l’observer, lors de nos sorties de plus en plus engagées, je découvre qu’il ne respire pas ! Il fonctionne en apnée, ce qui est incroyable. Comment fait-il pour grimper sans souffler ? J’ai l’idée d’organiser une randonnée glaciaire à 4000 mètres. Nous l’encordons en 3ème de cordée, le Guide en 1er à qui je demande de monter le rythme peu à peu. La corde se tend, Christian s’accroche mais il ne va pas tenir longtemps.
C’est alors que j’entends un râle profond, comme une détonation. On s’arrête immédiatement, Christian s’est assis, les larmes aux yeux. Il vient de s’autoriser à … respirer ! Je m’approche de lui, conscient qu’il a posé une très ancienne croyance. « Petit, ma mère abusive m’a éduqué à me taire, à ne pas faire du bruit pour ne pas gêner. J’ai appris à me rendre invisible, inaudible jusqu’à ne plus exister, à éteindre mon souffle » me dit-il calmement. « Je viens de naître » ajoute-t-il, en me prenant dans ses bras.
Plus loin, nous travaillons à évacuer le CO2 et l’anxiété dans l’expiration, à se tenir droit, fier, à dégager la poitrine et à maintenir la tête droite tout en marchant au paradis.
Le lendemain, je reçois un message whatsapp de Christian : Merci Laurent, c’est la première nuit de ma vie que je dors profondément.